l'avocat au barreau de Bruxelles a présenté son client comme "quelqu'un qui connaît beaucoup sur le dossier rwandais et qui pourrait faire la lumière sur la tragédie rwandaise et surtout sur l'assassinat des casques bleus belges" Dix casques belges ont été tués le 7 avril 1994 à Kigali alors qu'ils étaient chargés de la protection de l'ancien premier ministre Agathe Uwilingiyimana, également assassinée le même jour.
Détenu depuis le 29 mars dernier à Dar-es-salaam, le major Bernard Ntuyahaga se présente régulièrement devant le juge Projestus Rugazia, du tribunal de Kisutu, dans le cadre D'une demande rwandaise D'extradition pour participation présumée dans le génocide anti-tutsi et les massacres D'opposants qui ont fait plus de cinq cents mille morts entre avril et juin 1994.
"Nous avons suffisamment de rapports et de témoins qui prouvent qu'il n'a pas participé dans quoi que ce soit lors de la tragédie rwandaise" a affirmé pour sa part l'avocat belge. Me de Temmerman a signalé qu'il devrait citer à la barre plusieurs témoins résidant en Belgique, dont le juge D'instruction qui a mené des enquêtes au Rwanda.
"Je vais tout faire pour astreindre le gouvernement rwandais à retirer sa demande D'extradition, et ce dans l'intérêt de la justice et de la manifestation de la vérité" a souligné l'avocat belge. Me De Temmerman a ajouté que son client semblait être utilisé politiquement, et qu'il allait s'efforcer de le démontrer à la justice tanzanienne.
Le major Bernard Ntuyahaga devrait se présenter le 11 août prochain devant le juge Rugazia, qui pourrait arrêter une date de début de l'examen de l'affaire au fond. Me de Temmerman devrait arriver en Tanzanie le 18 août prochain pour élaborer avec son client une stratégie de défense.
Me de Temmerman défendra le major Bernard Ntuyahaga aux côtés de Me Jwani Mwaikusa, professeur de droit à l'université de Dar-es-salaam, commis D'office par la Cour suprême de Tanzanie. Me de Temmerman a été agréé le 15 juillet dernier par la Cour suprême de Tanzanie.
Témoin potentiel dans l'affaire BAGOSORA
Dans l'intervalle, des sources judiciaires ont confirmé que les avocats de l'ancien directeur de cabinet au ministère rwandais de la défense, le colonel Théoneste Bagosora, ont demandé des mesures de protection pour Bernard Ntuyahaga.
Dans une requête en extrême urgence soumise au TPIR, la défense de Théoneste Bagosora indique qu'il ne fait aucun doute que les conditions de la mort des dix militaires belges seront un élément important dans le cadre de ce procès.
La défense du colonel Bagosora demande en conséquence à la présidente du TPIR, la juge sud-africaine Navanethem Pillay, ou à un autre jugé qu'elle déléguerait, D'ordonner à la Tanzanie "de ne pas procéder à l'extradition ou l'expulsion de Monsieur Bernard Ntuyahaga vers tous pays et particulièrement vers le Rwanda" selon la requête citée par l'hebdomadaire français sur le TPIR, Ubutabera.
La défense de Bagosora demande en outre à la section D'assistance aux témoins et aux victimes "de prendre toutes dispositions [...] pour assurer la protection et la sécurité de Monsieur Bernard Ntuyahaga jusqu'à sa comparution en qualité de témoin au procès de Monsieur Théoneste Bagosora"
Les avocats de Théoneste Bagosora estiment que "M. Ntuyahaga est potentiellement en danger et qu'il existe de fortes présomptions qu'il ne puisse pouvoir témoigner au procès de M. Bagosora", en cas D'éventuelle extradition.
Le témoignage de Bernard Ntuyahaga sera utile à la défense du colonel Bagosora et plus généralement à la manifestation de la vérité pour l'appréciation exacte des faits s'étant déroulés le 7 avril 1994 au Rwanda et ayant entraîné la mort des dix militaires belges, soutiennent les avocats, qui expliquent que "la présence et la disponibilité de monsieur Bernard Ntuyahaga lors du procès du requérant sont donc indispensables "
Le colonel Bagosora est défendu par les avocats français Me Raphaël Constant et canadien Me Jacques Larochelle.
Le major Ntuyahaga s'était rendu volontairement TPIR en juin dernier, "craignant sa déportation vers le Rwanda", selon lui. Il avait D'abord demandé D'être témoin protégé du Tribunal mais il a été par la suite accusé et gardé au centre de détention des Nations Unies à Arusha.
Le 18 mars dernier, le TPIR a accepté une requête du procureur en vue de retirer l'acte D'accusation établi contre lui, portant sur un crime contre l'humanité, et a ordonné qu'il soit relaxé. La requête du procureur visait à faciliter que l'ancien officier soit jugé en Belgique, mais les juges du TPIR ont affirmé qu'ils ne sont pas compétents pour le remettre à une juridiction nationale.
Le greffier du TPIR a relaxé Bernard Ntuyahaga le 29 mars dernier à Dar-es-salaam, après qu'une demande de la défense en vue de surseoir à la décision du 18 mars ait été rejetée. Ntuyahaga a été arrêté le même jour par les autorités tanzaniennes.
La Belgique avait alors introduit une demande D'extradition auprès des autorités tanzaniennes. La demande belge a été cependant rejetée, la Tanzanie arguant que le traité D'extradition entre les deux pays prévoit qu'un suspect ne peut être transféré dans un pays autre que celui dans lequel il est supposé avoir commis les crimes allégués.
BN/AT/JC/PHD/FH (NU§0729A )