AUCUN ACCORD ENTRE LE GREFFIER DU TPIR ET LES RESCAPES

Kigali, 27 janvier 2002 (FH) – Le greffier du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), Adama Dieng, a quitté Kigali dimanche au terme d'une visite de trois jours, dominée par la décision des survivants du génocide, annoncée jeudi dernier, de suspendre leur collaboration avec le TPIR. Mr Dieng a rencontré les responsables des organisations des rescapés AVEGA (Association des veuves du génocide) et IBUKA (collectif des organisations des rescapés), mais ces derniers n'ont pas fléchi.

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" Les résultats sont globalement positifs, dans la mesure où ils ont, j’espère, assez bien compris la réalité de la justice internationale. Mais, s’il y a un regret que j’exprime, c’est la décision de maintenir leur mot d’ordre de garder les témoins qui sont membres de leurs organisations", a déclaré le greffier à l’Agence Hirondelle, à la sortie de la salle de réunion du Centre d’Information et de Documentation « Umusanzu w’Ubwiyunge » du TPIR à Kigali.

"Il importe qu’ils reviennent sur cette décision, sinon ils vont être les responsables de ce que je pourrais appeler une injustice à l’égard des victimes. Si j’étais, moi, témoin-victime, je préfèrerais être harcelé plutôt que de voir demain la personne qui m’a violée plastronner et marcher la tête haute dans les rues à travers l’Europe, à travers le monde. C’est pourquoi, je pense que ce dernier mot a quand même retenu l’attention de certains d’entre eux. Je ne dirais pas que c’est l’unanimité. Mais j’espère qu’ils auront une position beaucoup plus sage et modérée".

De son côté, le président du collectif IBUKA, Antoine Mugesera, a déclaré à l’Agence Hirondelle que son organisation et AVEGA avaient présenté au greffier du TPIR leurs conditions pour la reprise de leur collaboration.

"Nous lui avons demandé de renvoyer immédiatement et d’engager des poursuites judiciaires contre tous ses agents de droit rwandais ou sous le couvert illégal des droits étrangers qui ont une implication personnelle dans le génocide, ou qui ont des relations familiales directes ou indirectes avec les présumés auteurs du génocide poursuivis par le TPIR.

" Une autre condition, c’est de renforcer les mesures de protection et de sécurité des témoins qui vont à Arusha et qui sont malmenés. Il faut remplacer les agents du service de protection qui se sont montrés inefficaces. Les associations de défense des rescapés ont demandé l’octroi de moyens nécessaires afin qu’elles puissent établir elles-mêmes à Arusha un bureau d’accueil, d’orientation et de protection des témoins.

" IBUKA et AVEGA ont conditionné la reprise de leur collaboration avec le TPIR au déménagement des services du greffe et des chambres de première instance du tribunal d’Arusha à Kigali, parce que nous pensons qu’à Kigali les témoins peuvent être en sécurité.

" Nous avons demandé aussi que IBUKA ne soit pas considérée à Arusha comme un syndicat de délateurs. Nous protestons énergiquement contre ça. Nous avons demandé que les juges puissent ramener à l’ordre les avocats qui déraillent."

"En conclusion, les pourparlers continuent. Nous allons transmettre par écrit au greffier toutes nos allégations. En attendant, nous restons sur nos positions. Il ne faut pas que les témoins aillent à Arusha dans les conditions actuelles".
WK/GF/FH