01.10.07 - RWANDA/CANADA - L'EX COMMANDANT DE LA MINUAR VIENT TEMOIGNER AU PROCES MUNYANEZA

Montréal, 1er Octobre 2007 (FH) — Le procès pour crime de guerre et crime contre l’humanité du Rwandais Désiré Munyaneza prend une nouvelle tournure mardi avec la comparution du général Roméo Dallaire, l’officier canadien qui avait dirigé le contingent de l’ONU entre 1993 et 1994.

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Durant les trois jours d'interrogatoire, l'ancien Commandant en chef de la MINUAR, désormais sénateur à Ottawa, sera entendu par l'accusation puis par la défense de l'accusé. M. Dallaire, n'apportera aucun élément concernant directement l'accusé: il ne témoignera qu'en tant que témoin de contexte.

«Il vise à démontrer l'existence au Rwanda, à l'époque des faits, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de l’existence d'un génocide», explique Me Richard Roy, un des trois procureurs qui mènent l'accusation en tant que représentants du Procureur général du Canada (ministre de la Justice).

Selon Me Mylène Dimitri, une des trois avocats de M. Munyaneza, son client «met toute son énergie sur la préparation de la défense [qui débute en janvier] car, même si les témoignages des experts sont importants, ils ne parlent pas de lui». Reste que, la défense n'a pas l'intention de seulement écouter les témoignages du général à la retraite. «Par le passé, il a fait certaines affirmations qui ont été contredites ensuite par des observateurs, y compris par des casques bleus», soutient Me Dimitri, en prévision du contre-interrogatoire.

Roméo Dallaire est le vingt-neuvième témoin à passer à la barre depuis que le procès s'est ouvert, le 26 mars 2007. Un premier «témoin-expert» a déjà comparu, le 17 septembre, devant la Cour supérieure du Québec: Rony Zachariah. Médecin pour MSF à l'hôpital de Butare (ville d'où est originaire M. Munyaneza), M. Zachariah est venu décrire les scènes auxquelles il a assisté. Il a notamment raconté le massacre de 150 patients, au sein même de son institution, le 23 avril 1994.

Ces témoignages contextuels doivent permettre à la Couronne d'établir l'ampleur des exactions auxquelles Désiré Munyaneza aurait pris part, même indirectement. Cet ancien riche commerçant du sud-est du Rwanda doit en effet répondre de sept chefs d’accusations : deux de génocide, deux de crimes contre l’humanité et trois de crimes de guerre.

Arrivé au Canada en 1997 avec un faux passeport camerounais, il avait alors demandé le statut de réfugié, craignant «d'être persécuté du fait de son appartenance à l'ethnie hutue ». Demande refusée en 2000 par les services canadiens d’immigration, soupçonnant M. Munyaneza d’avoir pris part aux persécutions, qui auraient fait 800 000 victimes entre début avril et juillet 1994. Au terme de cinq années d’enquête menée par la GRC (police fédérale), M. Munyaneza, qui avait été rejoint par sa famille, a été arrêté en octobre 2005 à Toronto (Ontario).

C'est la première fois au Canada qu'un individu est poursuivi pour de tels motifs. En effet, une loi entrée en vigueur en octobre 2000 donne aux magistrats de la Couronne la pleine compétence en matière de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre.

Désiré Munyaneza, dont Ottawa assure la majorité des frais de défense (estimés à 600.000 $ CAN, soit 315,5 millions de Frw), encourt la prison à perpétuité.

Après Roméo Dallaire, se succèderont deux autres «témoins-experts», Alison Des Forges, historienne et André Guichaoua, sociologue, qui devraient clore la preuve de l'accusation.

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