28.12.07 - TPIR/BILAN - LE TPIR N’A PAS TOUJOURS PRESERVE LES DROITS DE LA DEFENSE

Arusha, 28 décembre 2007 (FH) - Les dix ans d’audience du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) s’ils ont permis de juger la plupart des responsables du génocide rwandais, ministres, officiers et responsables politiques, ont aussi été marqués par des atteintes aux droits de la défense, estiment plusieurs avocats interrogés par l’agence Hirondelle.

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Plaidant encore dans des affaires en cours, ils ont préféré garder l’anonymat même s’ils ont souvent cité en exemple des affaires qui ne les concernaient pas. Actes d’accusation mal ficelés, jugements tirés par les cheveux, témoins dont on se demande ce qu’ils font là, entorses graves aux règles de procédure, les récits abondent mais tous s’accordent pour vanter les mérites de l’institution.

« Avant ces tribunaux ad hoc (TPIR et TPIY) il n’y avait rien depuis Nuremberg » dit un ténor du barreau de Montréal. « Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain » explique un défenseur venu du sud de la France. « L’institution n’est pas parfaite mais cela ne met pas en cause son absolue nécessité » ajoute-t-il. « On doit veiller à ce que ce vieux rêve qu’incarne la justice internationale respecte les principes essentiels qui justifient sa présence notamment sur l’équité des procès ».

« Des enquêteurs et des procureurs viennent de pays non démocratiques, sans tradition juridique » explique un autre « Une déclaration de témoin peut être refusée dans un procès et apparaître dans un autre» explique-t-il. «Chez nous, un procureur qui fait ça est accusé de parjure, il ne peut revenir en chambre, c’est intellectuellement et juridiquement difficile à accepter» dit il.

Enfin sortie de longs mois de présentation de l’accusation une avocate africaine n’hésite pas à parler de «tribunal bananier». Même si le TPIR s’est glorifié récemment d’avoir jugé le premier cas de faux témoignage, elle énonce les témoins «pris les doigts dans le pot de confiture» à plusieurs reprises. La plupart des témoins de l’accusation sont détenus au Rwanda ce qui pourrait logiquement justifier leur mise à l’écart, estiment plusieurs défenseurs.

« De quelle vérité parlons nous ?» demande l’un d’entre eux. « La chambre d’appel avec son constat judiciaire a fait une erreur fondamentale. Chaque mois on en apprend un peu plus sur la seconde guerre mondiale et au Moyen age on a fait le constat judiciaire que la terre était plate» ajoute-t-il.

Militants des droits de l’homme, passionnés de justice, la plupart de ces avocats, ne sont pas toujours, contrairement à l’opinion répandue à Arusha, venus là pour l’appât du gain. A 100 USD l’heure d’audience, certains perçoivent entre 10 et 15.000 dollars par mois, mais ont du abandonner leur clientèle occidentale, laisser leurs cabinets aux mains de confrères.

Evoquant au cours de l’année le problème de la rémunération des avocats le greffier du TPIR a cité des chiffres : la défense au cours des deux exercices 2006/2007 a coûté 21 millions de dollars, frais d’enquêtes compris. Cela représente 8,4% du budget du tribunal. L’accusation pendant ce temps en a représenté 24%.

« Les histoires d’argent sont quasiment insolubles » dit un pionnier de l’assistance juridique internationale. « Il faut juste veiller à ce que le système soit équitable mais on risque de voir venir vers ces tribunaux des avocats qui n’ont pas de client, ce qui n’est pas bon signe » s’inquiète-t-il.

PB/GF
© Agence Hirondelle