Le procureur de la CPI appelle la Russie à coopérer sur l'enquête en Ukraine (interview AFP)

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La Russie devrait coopérer à l'enquête de la Cour pénale internationale (CPI) sur les crimes de guerre présumés commis en Ukraine depuis l'invasion russe, a déclaré vendredi à l'AFP le procureur du tribunal.

Karim Khan a déclaré que Moscou a refusé de travailler avec le tribunal depuis l'ouverture de son enquête, mais a ajouté que sa "porte est ouverte".

Le Britannique a également insisté sur le fait que les suspects de crimes de guerre pourraient être traduits en justice, bien qu'il ait refusé de dire si le président russe Vladimir Poutine pourrait l'être un jour.

"L'invitation est là, ma porte est ouverte et je continuerai également à frapper à la porte de la Fédération de Russie", a déclaré M. Khan lors d'un entretien au tribunal à La Haye.

"S'il y a des allégations de la part de la Fédération de Russie (...) si elle mène ses propres enquêtes ou poursuites ou si elle a des informations pertinentes, partagez-les avec nous", a-t-il ajouté.

La Russie et l'Ukraine ne sont pas membre de la CPI, mais Kiev a accepté la compétence de la Cour sur son territoire et travaille avec le bureau du procureur dans son investigation.

La Russie affirme pour sa part que les allégations de crimes de guerre sont fausses et le président Vladimir Poutine a justifié l'invasion en disant que l'Ukraine se préparait à commettre un "génocide" dans l'Est du pays.

- 'Un champ de bataille' et une 'scène de crime' -

M. Khan a annoncé quatre jours après l'invasion russe une enquête sur d'éventuels crimes de guerre et crimes contre l'Humanité commis en Ukraine.

Il s'est ensuite rendu à Boutcha, une ville de la banlieue de Kiev où des journalistes de l'AFP ont découvert vingt corps de civils gisant dans une rue, et où des responsables ont déclaré que des centaines de personnes avaient été tuées.

M. Khan a la semaine dernière déployé en Ukraine la plus grande équipe d'enquête jamais envoyée sur le terrain par la cour, créée en 2002.

"La réalité est que c'est un champ de bataille, mais c'est aussi une scène de crime", a-t-il déclaré.

La justice ukrainienne a condamné la semaine dernière un soldat russe à la perpétuité pour le meurtre d'un civil de 62 ans.

La procureure en chef ukrainienne a suggéré que la CPI pourrait traiter les affaires plus médiatisées, mais M. Khan a déclaré que la CPI travaillait toujours avec l'Ukraine et ses partenaires internationaux.

Il a refusé de donner des "calendriers artificiels" sur le moment où la CPI pourrait poser ses premiers actes d'accusation, affirmant que ce serait "courir à la catastrophe".

La cour n'est en outre "pas là pour cibler un pays en particulier" mais veut "faire la vérité" sur tous les crimes de guerre commis en Ukraine, a-t-il souligné.

Alors que des questions ont été soulevées sur la manière dont d'éventuels suspects pourraient être traduits en justice, M. Khan a rappelé de précédents "succès significatifs" des tribunaux internationaux.

Il a pris pour exemple la condamnation d'accusés des crimes dans les guerres en ex-Yougoslavie et du génocide rwandais de 1994.

"De nos jours, nous savons qu'il est difficile de se cacher, il faut la coopération des États pour s'assurer que les mandats sont exécutés", a-t-il souligné.

Si la procureure en chef ukrainienne a déclaré que Vladimir Poutine pourrait un jour se retrouver sur le banc des accusés, M. Khan a refusé de "parler d'individus".