12.09.08 - RWANDA/EGLISE - L'ASSASSINAT DES EVEQUES ETAIT UNE REVANCHE EXPLIQUE LA DEFENSE

Kigali, 12 septembre 2008 (FH) - L'assassinat des 3 évêques et 12 autres gens d'Eglise, à Gakurazo, par certains soldats du 157ème bataillon du FPR, était une réaction directe provoquée par le comportement inhumain et « génocidaire » de ces hommes d'Eglise, a tenté de faire valoir la défense en présentant mercredi 5 témoins lors du procès des membres du FPR accusés d'avoir assassiné ces hommes à Gitarama en juin 1994.

2 min 23Temps de lecture approximatif

« Le calvaire que ces hommes ont infligé aux réfugiés de Kabgayi a, à lui seul, dans le contexte du moment et sans autre préalable, poussé nos clients au crime, sans préméditation », a tenté d'expliquer l'un des avocats Me Charles Shema, suggérant des circonstances atténuantes.

Le Général de Brigade Wilson Gumisiriza et le Major Wilson Ukwishaka, les capitaines John Butera et Dieudonné Rukeba sont accusés d'avoir assassiné, le 5 juin 1994, 15 hommes d'Eglise au monastère de Gakurazo, dans l'ancienne commune de Mukingi. Si les 2 premiers plaident non coupables, les 2 autres reconnaissent avoir pris part à la tuerie.

« Va-t-en ! Il n'y a pas de refuge à l'Evêché. N'êtes-vous pas cause de vos malheurs actuels ? », aurait dit Mgr Thaddée Nsengiyumva à un prêtre Tutsi venu se réfugier auprès de lui. « Si j'avais eu un fusil, je les aurais moi-même fusillé sur le champ », a témoigné le prêtre. Pour un autre religieux : "Les évêques avaient le pouvoir sur les officiels, les militaires, les interahamwe : un seul mot et ils auraient sauvé tout le monde. Mais ils faisaient eux-mêmes partie des bourreaux », a-t-il dit.

« Nous étions à la messe officiée par Mgr Thaddée. Des militaires et des interahamwe sont entrés et ont emmené des gens pour aller les tuer. Monseigneur nous a dit :"Ne vous en faites pas, ce sont des acolytes des Inkotanyi qui vont s'expliquer devant l'Etat'. Nous ne sommes plus retournés à la messe. Quand les Inkotanyi nous ont libérés, ils ont dû s'interposer devant des jeunes gens armés de haches et de morceaux de bois qui allaient chercher ces Evêques pour les tuer », a raconté un autre témoin.

Un autre témoin estime n'avoir vu « ni amour ni prière, ni eau, ni eucharistie, ni humanité de ces prêtres ». Il confirme que les rescapés, en cours de route vers Ruhango, ont menacé de les lapider en les appelant « interahamwe ». L'accusation demande : « Est-ce qu'il n'y avait pas de militaires qui auraient assisté aux menaces de ces rescapés ? »

Pour l'accusation, conduite par le Capitaine Ngabo Kayijuka, « en vertu de l'article 3 des Conventions de Genève relatives aux crimes de guerre », les 2 officiers, Gumisiliza et Ukwishaka, « pouvaient prévenir ces crimes », surtout que, d'après les propos des réfugiés de Ruhango, ils savaient que ces hommes « avaient joué un rôle dans l'extermination des tutsi ». « Cette présomption suffisait pour prendre des mesures exceptionnelles de protection à leur égard », dit le procureur.

Le procès doit reprendre le 24 septembre prochain pour l'audition de trois autres témoins de la défense.

SRE/PB/GF

© Agence Hirondelle