De l'interdiction des "emplois familiaux" au contrôle des frais de mandat, les lois de "moralisation" de la vie politique du début du quinquennat Macron ont permis un "important pas en avant", assurent deux députés LREM et LR dans un rapport mercredi, où ils formulent 50 propositions, notamment pour 2022.
Financement des partis et candidats: des évolutions urgentes
- Pour une "banque de la démocratie": les lois sur "la confiance dans la vie politique" - leur dénomination officielle - prévoyaient la création d'une telle banque par ordonnance du gouvernement. L'objectif était que les candidats, partis et groupements politiques puissent, "en cas de défaillance avérée du marché", financer les campagnes des élections présidentielle, législatives, sénatoriales et européennes, via des prêts, avances ou garanties. Mais cette banque, projet cher à François Bayrou (MoDem), n'a pas vu le jour.
Dans leur rapport d'évaluation, la présidente de la commission des Lois de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet (LREM) et le député LR Philippe Gosselin reviennent à la charge face à "la persistance de difficultés" dans l'accès au crédit, en particulier pour le RN de Marine Le Pen. Ils voudraient dans l'immédiat permettre à la Banque postale d'octroyer des prêts et garanties aux candidats et partis dès les échéances de 2022, présidentielle et législatives. De façon pérenne, une loi pourrait autoriser la Caisse des dépôts à prendre le relais.
- Les deux parlementaires proposent aussi de réformer les modalités de remboursement par l'État des frais de campagne pour la présidentielle, pour davantage d'équité. Ils appellent à ouvrir aux Français la possibilité de consentir des prêts aux candidats à l'Elysée.
- Pour les formations politiques, dont le financement est pour partie fonction de leurs scores aux élections, ils suggèrent pour un lissage de prendre en compte plusieurs résultats électoraux, et non les seules dernières élections législatives et européennes.
Satisfecit sur les pratiques des élus
- Interdiction d'employer des membres de la famille proche comme collaborateurs pour les ministres, parlementaires et exécutifs locaux, à la suite de l'affaire Fillon: le bilan de cette mesure des lois sur la confiance est globalement positif, jugent les auteurs.
Même si des députés et syndicats de collaborateurs considèrent qu'il aurait été "préférable de mieux lutter contre les emplois fictifs sans basculer dans un régime d'interdiction des +emplois familiaux+".
- Suppression de la réserve parlementaire, dont disposaient députés et sénateurs pour attribuer des subventions aux associations et collectivités (147 millions d'euros au total en 2017, soit 130.000 euros en moyenne par député): les avis sont partagés.
Mme Braun-Pivet se félicite de la mesure, à l'inverse de M. Gosselin et d'autres membres de la majorité qui considèrent que la réserve permettait de mieux "participer à la vie" des territoires.
- Nouveau régime pour les frais de mandat parlementaire, avec une prise en charge directe, un remboursement sur présentation de justificatifs ou une avance: cela fonctionne mais c'est complexe.
Assemblée et Sénat ont chacun leur système de contrôle. Le nouveau régime est bien rentré dans les pratiques mais certains renâclent encore, tel Alain Tourret (LREM) qui trouve désagréable d'être "obligé de montrer des justificatifs sur les repas qu'on a pris". L'ancienne enveloppe pour frais de mandat (IRFM) avait donné lieu à des dérives.
- Peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité étendue, notamment en cas de manquement à la probité: l'application est "mitigée", plusieurs peines prononcées ayant été annulées par la Cour de cassation. Les auteurs suggèrent d'étendre cette peine obligatoire à certaines infractions fiscales et en matière de travail illégal, et d'instaurer une peine facultative d'inéligibilité en cas de condamnation pour certains délits de presse dont la contestation de crime contre l'humanité.
- Prévention des conflits d'intérêts: aller plus loin
Les lois sur la confiance ont imposé de nouvelles contraintes aux ministres, parlementaires, leurs collaborateurs et les lobbies, en encadrant notamment le cumul d'activités pour députés et sénateurs. Ces obligations sont respectées.
Le registre public des déports, en cas de potentiel conflit d'intérêts sur un dossier pour les parlementaires, est cependant très insuffisamment utilisé.
Au-delà, Mme Braun-Pivet souhaite instaurer, pour tous les parlementaires, une obligation de "sourcer" les amendements quand ceux-ci sont issus ou inspirés de propositions de représentants d'intérêts. Elle appelle aussi de ses voeux une publicité de l'agenda des parlementaires lorsqu'ils rencontrent des lobbies. La droite est plus prudente, appelant à ne pas confondre "transparence et voyeurisme".