Suède : un ancien général syrien jugé pour crimes de guerre

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Un ancien général syrien a commencé à être jugé lundi devant un tribunal à Stockholm pour son rôle présumé dans des crimes de guerre dans son pays en 2012, devenant le plus haut responsable militaire syrien jugé en Europe.

Mohammed Hamo, âgé de 65 ans et vivant en Suède, est accusé de "complicité" de crimes de guerre entre janvier et juillet 2012, une accusation qui peut potentiellement lui valoir une condamnation à la prison à perpétuité.

Vêtu d'une chemise bleu foncé, d'un jean et de baskets, Mohammed Hamo a écouté attentivement et pris des notes pendant que la procureure Karolina Wieslander lisait les chefs d'accusation.

L'ancien officier a contribué "par ses conseils et son action" aux agissements de l'armée "dont les attaques ont été systématiquement menées en violation des principes de distinction, de prudence et de proportionnalité", a-t-elle dit.

"La guerre a donc été menée sans discernement", a déclaré Mme Wieslander devant la cour.

Le procès devrait durer jusqu'à fin mai.

- Dommages "disproportionnés" -

La procureure a estimé que la "guerre livrée par l'armée syrienne a comporté des attaques aériennes et terrestres généralisées dont les auteurs sont inconnus au sein de l'armée syrienne".

Les attaques ont causé des dommages aux civils et à leurs biens "de façon disproportionnée par rapport aux avantages militaires généraux concrets et immédiats que l'on pouvait escompter", a-t-elle dit.

En tant que général à la tête d'une division armée, Mohammed Hamo a participé à la coordination de ces opérations et a fourni des armes aux unités impliquées, facilitant la mise en oeuvre d'ordres "à un niveau opérationnel".

Le militaire syrien nie toute responsabilité criminelle, a répondu son avocate Mari Kilman.

Il ne peut pas être tenu responsable des actions "car il a agi dans un contexte militaire et a dû suivre les ordres", a déclaré son avocate à la cour.

Hamo a également nié toutes les accusations individuelles à son encontre et a fait valoir que la loi syrienne devait être appliquée, a-t-elle ajouté.

Sept parties civiles, plusieurs d'entre elles étant des Syriens originaires des villes en question, vont témoigner au procès. Parmi elles, figure un photographe britannique blessé pendant l'une des frappes citées dans l'acte d'accusation.

La guerre civile en Syrie entre le régime de Bachar al-Assad et des groupes d'opposition armés dont l'organisation jihadiste Etat islamique (EI), déclenchée en 2011 par la répression de manifestations en faveur de la démocratie, a fait plus d'un demi-million de morts et morcelé ce pays.

- "Impunité" -

"Les attaques menées en 2012 à Homs et Hama et dans leurs environs ont causé des dommages considérables aux civils et des destructions immenses de leurs biens", a déclaré à l'AFP Aida Samani, conseillère juridique principale auprès de l'organisation de défense des droits Civil Rights Defenders.

"L'armée syrienne s'est conduite de la même manière dans d'autres villes de Syrie en toute impunité", a-t-elle poursuivi.

Ce procès sera le premier en Europe à "traiter de ce type d'attaques aveugles par l'armée syrienne", selon Mme Samani. "Ce sera la première occasion pour les victimes de ces attaques de faire entendre leur voix devant un tribunal indépendant".

Mohammed Hamo, qui était brigadier général dans l'armée, est à ce titre le dirigeant militaire syrien de plus haut rang à comparaître devant un tribunal en Europe, mais des procédures sont en cours dans d'autres pays visant des généraux de plus haut rang.

En mars, Rifaat al-Assad, un des oncles du président syrien Bachar al-Assad, a été renvoyé devant la justice suisse pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité remontant aux années 1980.

Il est cependant peu probable que cet homme, rentré en Syrie en 2021 après 37 ans d'exil, comparaisse en personne devant le tribunal. En Suisse, une personne peut être jugée en son absence, sous certaines conditions.

En France, le président syrien Bachar al-Assad, son frère et deux généraux font l'objet depuis novembre de mandats d'arrêt internationaux de la justice, soupçonnés de complicité de crimes contre l'humanité pour les attaques chimiques perpétrées en Syrie à l'été 2013.

En janvier 2022, un ancien colonel syrien, Anwar Raslan, a été condamné par la justice allemande à la prison à perpétuité pour crimes contre l'humanité, à l'issue du premier procès au monde sur des exactions du régime de Bachar al-Assad.