Israël arrête un soldat soupçonné d'avoir achevé un assaillant palestinien

2 min 59Temps de lecture approximatif

L'armée israélienne a arrêté jeudi un soldat soupçonné d'avoir achevé un Palestinien qui avait été blessé en attaquant au couteau des forces israéliennes à Hébron, dans le sud de la Cisjordanie occupée.

Les faits documentés par une vidéo mise en ligne et susceptibles d'attiser les tensions semblent être l'un des cas les plus flagrants d'usage excessif de la force par des soldats israéliens au cours de la vague de violences commencée depuis bientôt six mois.

Ils ont été immédiatement dénoncés comme une "exécution" par les défenseurs des droits de l'Homme et comme un "crime de guerre" par les Palestiniens.

La vidéo a été prise quelques instants après une énième attaque au couteau commise, selon l'armée israélienne, par deux Palestiniens contre les forces israéliennes à l'entrée de Tel Rumeida, l'un des quartiers les plus tendus entre Palestiniens et colons israéliens dans une ville qui est elle-même une poudrière.

Les deux Palestiniens sont au sol à un carrefour tandis que les secouristes soignent un soldat blessé, au milieu des ambulances et des forces israéliennes.

Le Palestinien au premier plan, allongé dans son sang, bouge encore faiblement la tête quelques secondes avant l'instant apparemment fatidique.

Un soldat s'approche de quelques pas et le met en joue à environ cinq mètres. Une déflagration retentit. Quelques secondes après, le sang s'écoule sous la tête du Palestinien, inerte. Les soldats à proximité se contentent d'un mouvement de recul au son de la détonation.

- Il "ne représentait aucun danger" -

L'armée a dans un premier temps rapporté qu'un soldat avait été gravement blessé au couteau et que ses deux agresseurs avaient été abattus.

Les Palestiniens ont été identifiés par les autorités palestiniennes comme Abdel Fattah al-Sharif, 21 ans, encore vivant au début de la vidéo, et Ramzi al-Qasrawi, 21 ans également.

La vidéo s'est propagée plus tard. Une porte-parole de l'armée a assuré qu'une enquête, confiée à la police militaire, avait été ouverte avant la diffusion de la vidéo.

L'armée considère ces faits comme "une grave violation de (ses) valeurs", a-t-elle dit. "Le soldat impliqué a été placé en détention", a-t-elle ajouté sans autre précision.

Le ministre palestinien de la Santé Jawad Awwad a dénoncé un "crime de guerre". Il a noté qu'avant le présumé coup de feu fatal, personne ne traitait le blessé palestinien.

Sarit Michaeli, une porte-parole de B'Tselem, une ONG israélienne de défense des droits de l'Homme dans les Territoires palestiniens, a parlé d'une "exécution".

C'est un volontaire de B'Tselem, vivant près des lieux, qui a filmé les faits.

"Il est clair que le jeune Palestinien (...) ne représentait aucun danger pour les services de sécurité", a dit la porte-parole.

Ces évènements sont survenus dans un contexte de violences renouvelées dont Hébron est l'un des centres de gravité et qui ont coûté la vie à 200 Palestiniens, 28 Israéliens, deux Américains, un Erythréen et un Soudanais depuis le 1er octobre, selon un décompte de l'AFP.

- Hébron sous haute surveillance -

La plupart des Palestiniens morts sont des auteurs ou auteurs présumés d'attaques.

Hébron, où 500 colons vivent retranchés sous haute protection de l'armée au milieu de 200.000 Palestiniens, a été le théâtre, avec ses environs, d'une multitude d'attaques.

Pour les colons, leur présence est un acte idéologique renvoyant à la présence juive aux temps bibliques. Hébron abrite le tombeau des Patriarches, vénéré par les juifs et les musulmans.

La ville faisait l'objet d'un dispositif de sécurité israélien renforcé jeudi en prévision du défilé de Pourim, grand moment festif juif. L'attaque de jeudi s'est produite à l'endroit d'où est parti le cortège quelques heures après. Toute la Cisjordanie a été bouclée pour Pourim.

Les forces israéliennes ont maintes fois été accusées d'exécutions extrajudiciaires par Amnesty International. Les Palestiniens ont annoncé la constitution d'un dossier pour la Cour pénale internationale. Israël a déclaré que la chef de la diplomatie suédoise Margot Wallström n'était plus la bienvenue après avoir réclamé des enquêtes approfondies sur la mort de certains Palestiniens.

Le chef d'état-major israélien lui-même, le général Gadi Eisenkot, a divisé les esprits en Israël en février en déclarant ne pas vouloir voir un soldat "vider son chargeur" sur une Palestinienne de 13 ans armée d'une paire de ciseaux, même si elle attaquait des soldats.