Yémen: démonstration de force rebelle deux ans après l'intervention arabe

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Deux ans après l'intervention d'une coalition militaire arabe au Yémen, les rebelles qui contrôlent la capitale Sanaa se disent prêts à résister jusqu'au bout, alors que les lignes de front sont figées et les efforts de paix au point mort.

Les rebelles chiites Houthis et leurs alliés, les partisans de l'ex-président yéménite Ali Abdallah Saleh, ont marqué cet anniversaire en organisant dimanche une manifestation géante à Sanaa, sous le slogan "Résistance à l'agression".

Selon des correspondants de l'AFP, des centaines de milliers de Yéménites --certains venant de régions contrôlées par les rebelles-- ont convergé vers la place Sabine, au centre de Sanaa, en scandant des slogans hostiles à l'Arabie saoudite, qui conduit la coalition arabe, et en promettant de "résister jusqu'au bout".

Symboliquement, un tribunal rebelle avait condamné à mort la veille le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi pour "haute trahison".

M. Hadi, qui vit la plupart du temps à Ryad, a été reconnu coupable d'avoir "usurpé le titre de président après la fin de son mandat", d'avoir "incité à l'agression menée par l'Arabie saoudite" et d'avoir "porté atteinte à l'indépendance et à l'intégrité territoriale de la République yéménite", a écrit l'agence de presse rebelle Saba.

Six autres responsables du gouvernement Hadi ont été condamnés à la même peine, toujours selon Saba.

Dans un discours samedi, l'ancien président Saleh a affirmé que "les Yéménites libres continueront à choisir l'option de la résistance tant que la coalition, conduite par l'Arabie saoudite, continuera à agresser leur pays et à privilégier le choix de la guerre".

"Tant que votre agression continuera, nous continuerons à résister", a surenchéri le leader rebelle Abdel Malek al-Houthi.

"L'ennemi a vécu dans l'illusion en se croyant capable de l'emporter en une semaine ou un mois", mais il s'est "enfoncé dans la boue", a-t-il ajouté à propos de la coalition arabo-sunnite conduite par l'Arabie saoudite.

- 'plan iranien' -

Côté gouvernemental, un éditorial diffusé par l'agence de presse pro-Hadi a affirmé que "la montée en puissance des miliciens Houthis cachait un plan iranien" visant non seulement le Yémen mais aussi les pays du Golfe.

Le conflit au Yémen a démarré après l'insurrection contre M. Saleh dans la foulée du Printemps arabe, en 2011.

S'estimant marginalisés, les Houthis, issus de l'importante minorité zaïdite (environ un tiers de la population) concentrée dans le nord, ont lancé une offensive fulgurante en 2014 qui leur a permis de s'emparer entre autres de la capitale Sanaa.

Le 26 mars 2015, l'Arabie saoudite et ses alliés ont déclenché une campagne de frappes aériennes contre les rebelles. Cette intervention a permis aux forces pro-Hadi de reprendre cinq provinces du sud, mais le nord et Sanaa restent toujours sous le contrôle des Houthis et de leurs alliés.

Deux ans tout juste après l'intervention arabe, plus de 7.700 personnes, majoritairement des civils, ont été tuées et 40.000 blessées dans la guerre au Yémen. Le pays subit la pire crise humanitaire du monde, selon l'ONU qui s'inquiète notamment des risques de famine.

Les efforts de l'organisation pour trouver une solution politique sont au point mort, comme l'a constaté l'émissaire onusien Ismail Ould Cheikh Ahmed.

"Il est dommage aujourd'hui que les parties ne veuillent pas s'asseoir autour de la table" de négociations, a-t-il déclaré le 14 mars à Genève.

"Un des sujets qui nous préoccupe, c'est l'augmentation des opérations militaires", s'est-il également inquiété.

Sur le terrain, les lignes de front n'ont pas bougé de manière significative depuis la reprise de cinq provinces du sud aux rebelles pendant l'été 2015.

Les offensives lancées dans les provinces de Marib et de Taëz pour prendre en tenailles Sanaa, depuis l'est et le sud, patinent.

Les raids aériens de la coalition se poursuivent sur une base quasi-quotidienne, faisant parfois des victimes civiles.

Le seul front réellement actif est celui du sud-ouest, qui a permis aux forces pro-Hadi d'avancer en direction du port de Hodeida, sur la mer Rouge.

Outre les pertes dans les rangs des rebelles et des forces gouvernementales, 42 réfugiés somaliens ont été tués dans cette zone le 16 mars alors qu'ils fuyaient dans une embarcation frappée par une attaque. Un acte "pouvant constituer un crime de guerre", selon l'organisation Human Rights Watch.