L'ONU a exprimé lundi son pessimisme face à l'avenir du Burundi, en crise depuis 2015, mettant en garde contre une aggravation de la situation avec un référendum prévu en mai qui permettrait au président Pierre Nkurunziza de rester au pouvoir jusqu'en 2034.
"Ce pays reste un sujet de préoccupation qui interpelle la communauté internationale", a résumé lors d'une réunion du Conseil de sécurité l'envoyé spécial de l'ONU pour le Burundi, le Burkinabé Michel Kafando.
"Il revient à l'Union africaine de rester fortement engagée en vue de l'aboutissement d'une médiation", a-t-il ajouté. Le responsable a aussi rejeté les critiques burundaises sur l'implication de l'ONU pour aider à résoudre la crise, assurant qu'elle ne comportait ni "ingérence", ni "partialité".
L'objectif des Nations unies, c'est de "tirer la sonnette d'alarme", a fait valoir l'envoyé spécial, en évoquant les nombreuses difficultés politiques, sociales et économiques traversées par le pays.
Le Burundi est en crise depuis que le président Nkurunziza a annoncé en avril 2015 sa candidature à un troisième mandat controversé et sa réélection en juillet de la même année. Le gouvernement rejette toute référence à cette crise, estimant que le pays va bien.
Un référendum constitutionnel controversé, qui permettrait au président Nkurunziza de briguer à partir de 2020 deux mandats de sept ans, est prévu en mai et des élections générales en 2020.
"Seul le parti majoritaire et quelques autres formations politiques qui lui sont alliées, peuvent mener des activités politiques sans entrave", a relevé Michel Kafando. "La conjoncture économique est loin de s'améliorer, en raison de la persistance de la situation politique. Or, un tel environnement ne peut être propice à l'organisation d'élections crédibles", a-t-il ajouté.
Dans un récent rapport, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait critiqué la volonté persistante des autorités burundaises de réformer la Constitution sans tenir compte des avis de l'opposition.
- 'Point mort' -
Plus de 5 millions de Burundais, soit plus qu'attendu, se sont inscrits sur les listes électorales pour ce référendum. L'opposition L'opposition a dénoncé des enrôlements forcés.
Lors des interventions de pays membres du Conseil de sécurité, l'ambassadeur ivoirien, Bernard Tanoh-Boutchoue a fait part de sa "préoccupation" face aux violations répétées des droits de l'Homme au Burundi. Il a invité le gouvernement à "un dialogue politique inclusif".
Son homologue éthiopien, Tekeda Alemu, a aussi souligné la nécessité "d'un grand consensus via un dialogue inclusif". L'objectif doit être de "maintenir la stabilité pour une paix durable", a fait valoir le diplomate.
L'ambassadeur burundais à l'ONU, Albert Shingiro, leur a répondu que le "dialogue" politique se "poursuivait normalement" dans son pays et "n'était pas au point mort".
En appelant les investisseurs économiques à se tourner à nouveau vers son pays, Albert Shingiro a demandé au Conseil de sécurité de l'ONU de retirer le Burundi de son "agenda". "Car la situation dans (le) pays est globalement calme et ne présente aucune menace à la sécurité internationale", a-t-il estimé.
Les violences qui ont accompagné la crise auraient fait au moins 1.200 morts et déplacé plus de 400.000 personnes entre avril 2015 et mai 2017, selon les estimations de la Cour pénale internationale (CPI), qui a ouvert une enquête.
Selon l'ONU, le tiers de la population du Burundi aura besoin d'une assistance humanitaire en 2018, soit une hausse de 20% sur une année. Il faudrait au moins 141 millions de dollars pour y faire face, selon la même source.
Le Burundi est désormais classé parmi les trois pays les plus pauvres du monde. Il traverse aussi une crise socio-économique caractérisée par un manque criant de devises, de régulières pénuries d'essence et des crises sanitaires ou alimentaires.