02.05.08 - TPIR/TRANSFERTS - UN AMI DE LA COUR REVIENT A LA CHARGE CONTRE LES TRANSFERTS AU RWANDA

Arusha, 2 mai 2008 (FH) - L’Association internationale des avocats de la défense s’est opposée une fois de plus au projet de transfert vers les juridictions rwandaises d’accusés du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) dans un mémoire supplémentaire daté du 26 avril. Ces arguments supplémentaires ont été déposés deux jours après l’audience consacrée à l’audition des parties concernant la requête du procureur en chef Hassan Bubacar Jallow visant à renvoyer devant la justice rwandaise l’ex-homme d’affaires Yussuf Munyakazi.

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En plus de la défense et du procureur, la chambre a également entendu les positions de quatre amis de la cour (amicus curiae) dont l’Association internationale des avocats de la défense.

En revenant à la charge, l’association explique que la décision de la justice française sur laquelle s'appuie notamment le Procureur n’est pas définitivement jugée.

Le 24 avril, M.Jallow a appelé les juges à prendre exemple sur un tribunal de Chambéry, en France, qui s’est prononcé, le 2 avril, en faveur de l’extradition vers son pays d’un Rwandais accusé de génocide et de crimes contre l’humanité, Claver Kamana.

Pour l’association internationale des avocats de la défense, le jugement invoqué par le procureur n’est qu’une décision rendue au premier degré qui ne devrait donc pas revêtir toute l’importance d’un arrêt d’une chambre d’appel.

Le jugement de Chambéry énonce en particulier que le TPIR "prévoit" d'envoyer des accusés au Rwanda pour y être jugés, alors que c'est justement de cette décision qu'il s'agit. Le serpent se mord la queue.

L’organisation doute par ailleurs de la possibilité pour des observateurs indépendants de faire le suivi d’affaires qui seraient transférées vers les tribunaux rwandais. Selon le règlement de procédures et de preuves, le procureur qui est à l'origine du transfert avec sa demande doit désigner un observateur qui lui rend régulièrement compte du déroulement des procédures, une disposition à laquelle certaines organisations ne sont pas prêtes à se plier.

A l’audience du 24 avril, l’Américaine Alison Des Forges, historienne et militante des droits de l’homme, a rappelé qu'elle avait refusé de se prêter à ce contrôle, car le fait de rendre compte au procureur violerait l’indépendance de son organisation, Human rights watch (HRW).

Lors de ce débat historique, le bureau du procureur a mis en cause la méthodologie et la compétence de HRW alors que dans l’établissement de ses actes d’accusations, il s’est appuyé sur les travaux de cette organisation. Mme Des Forges est d’ailleurs l’un des principaux témoins experts de l’accusation.

La chambre a par ailleurs entendu lors de cette audience le procureur général du Rwanda, Martin Ngoga et le bâtonnier de Kigali, Gatera Gashabana qui ont abondé dans le sens de M.Jallow mais n'ont pu prouver que les avocats seraient indépendants et rémunérés conformément aux statuts du TPIR.

La décision de la chambre a été mise en délibéré au terme de cette audience - marathon.

Pour terminer les procès en première instance, comme demandé par le Conseil de sécurité, le TPIR est obligé de transférer certains accusés vers des juridictions nationales. Mais les pays sans lien avec les inculpés ne semblent pas pressés d’accueillir des affaires, ce qui fait de Kigali la principale destination potentielle. En tout cinq requêtes visant à renvoyer des affaires devant les tribunaux rwandais sont pendantes devant le TPIR.

Basé à Arusha, dans le nord de la Tanzanie, ce tribunal a prononcé, à ce jour 30 condamnations et 5 acquittements.

PB/GF