Ali Kosheib à la CPI : enfin, le premier procès des crimes du Darfour ?

Ce soir mardi 9 juin, le Soudanais Ali Muhammad Ali Abd–Al-Rahman alias « Ali Kosheib », va passer sa première nuit dans la prison hollandaise de Scheveningen, où il a été transféré en exécution d’un mandat d’arrêt  de la Cour pénale internationale (CPI) délivré en avril 2007. L’ancien chef de milices Janjawids, poursuivi pour des massacres commis au Darfour en 2003 et 2004, s’est selon la CPI « rendu volontairement en République centrafricaine », d’où il est parti ce matin. Ce quatrième suspect soudanais à comparaître devant la CPI (après Bahr Idriss Abu Garda dont les charges n’ont pas été confirmées, Saleh Mohammed Jerbo qui est décédé, et Abdallah Banda Abakaer Nourain porté disparu) devrait être le premier à y être jugé pour les atrocités commises au Darfour. Kosheib est un subalterne. Ses ‘supérieurs’ à l’époque, l'ancien chef du bureau Darfour au ministère de l’Intérieur Ahmad Haroun, l'ex-ministre de la Défense Abdulreheem Hussein et l'ancien président Omar Al-Bashir, demandés eux aussi par la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, sont actuellement détenus au Soudan, et poursuivis pour corruption, principalement. C’est en 2005 que le bureau du procureur de la CPI, saisie par le Conseil de sécurité des Nations unies, a ouvert ses enquêtes sur la situation au Darfour, qui aurait fait 300 000 morts et 2,7 millions de déplacés selon les Nations unies, depuis le début du conflit, en 2003.

Ali Kosheib à la CPI : enfin, le premier procès des crimes du Darfour ?
Ali Kushayb © JusticeInfo.net
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Ali Kosheib, chef des milices Janjawid recherché depuis 2007, est détenu par la Cour pénale internationale (CPI) pour des crimes de guerre et crimes contre l'humanité présumés commis au Darfour, a annoncé mardi la Cour.

M. Kosheib, qui serait né en 1957, est un ancien proche du président soudanais déchu Omar el-Béchir, lui aussi recherché par la CPI et actuellement détenu à Khartoum.

Ali Kosheib "est désormais détenu par la CPI après s'être rendu volontairement en République centrafricaine", indique un communiqué de la Cour basée à La Haye.

"Nous avons été officiellement informés de l'arrivée de Kosheib au siège de la CPI à La Haye", a précisé mardi un haut responsable soudanais auprès de l'AFP.

Selon ce responsable, M. Kosheib a été transféré au centre de détention de la Cour situé à La Haye.

M. Kosheib, qui faisait l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI depuis 2007, est accusé de 50 chefs de crimes contre l'humanité et crimes de guerres qui auraient été commis dans le cadre du conflit au Darfour entre 2003 et 2004, dont meurtres, viols, pillages et tortures.

Cette région de l'ouest du Soudan a été le théâtre à partir de 2003 d'une guerre civile, marquée par des atrocités des milices arabes pro-régime Janjawid.

M. Kosheib "aurait personnellement participé à certaines des attaques lancées entre août 2003 et mars 2004 contre des civils", a indiqué la CPI.

"Jour historique"

L'ONG Human Rights Watch (HRW) a salué l'arrestation de M. Kosheib, évoquant un "jour historique" pour les victimes "des atrocités commises à travers le Darfour".

"Le monde a regardé avec horreur le gouvernement soudanais mener des attaques brutales contre des civils au Darfour, tuant, violant, incendiant et pillant des villages", a déclaré dans un communiqué Elise Keppler, directrice adjointe du programme Justice internationale de HRW.

Cette arrestation contribue selon elle à rendre tangible l'espoir des victimes et de leurs familles d'obtenir justice.

La CPI a notamment remercié les autorités centrafricaines et la Mission des nations unies en Centrafrique (Minusca) "pour leur soutien et coopération lors de l'arrestation".

"La première comparution de M. Kosheib" devant la CPI "aura lieu dans les meilleurs délais", a précisé la Cour, fondée en 2002 pour juger des pires atrocités commises dans le monde.

Depuis le début du conflit ayant éclaté au Darfour en 2003 entre le pouvoir central et des insurgés issus de minorités ethniques, 300.000 personnes ont été tuées et des millions déplacées, selon l'ONU.

En plus d'Omar el-Béchir, trois autres suspects sont toujours recherchés par la CPI, dans le cadre de son enquête sur la situation au Darfour, ouverte en 2005 après le renvoi du Conseil de sécurité de l'ONU.