LE PARLEMENT VOTE LA LOI SUR LES JURIDICTIONS TRADITIONNELLES

Arusha/Kigali, 13 octobre 2000 (FH) - Le parlement rwandais a voté jeudi la loi autorisant la création des juridictions traditionnelles, a rapporté la radio nationale rwandaise. Appelées "gacaca" en kinyarwanda, ces juridictions "participatives" devraient contribuer à faire connaître toute la vérité sur ce qui s'est passé pendant le génocide anti-tutsi et les massacres d'opposants en 1994, selon le texte de loi.

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Elles devraient également permettre d'accélérer les procès des quelques 120.000 personnes détenues dans les prisons rwandaises pour génocide et crimes contre l'humanité.

Les juridictions gacaca sont également conçues dans le cadre de la lutte contre l'impunité au Rwanda et la promotion de la réconciliation nationale, expliquent les autorités.

Selon le texte adopté, les juges qui devront exercer dans les juridictions gacaca seront choisis parmi les Rwandais intègres, honnêtes, de bonne conduite, soucieux de la vérité et opposés au sectarisme et à la discrimination.

Les juridictions gacaca devraient notamment contribuer à l'élaboration des listes des personnes qui habitaient dans toutes les unités administratives de base (cellules) avant le génocide ainsi que celles des victimes.

Les gacacas auront trois organes appelés assemblée, siège et comité de coordination. Les gacacas instruiront à charge et à décharge.

Le ministre rwandais de la justice, Jean de Dieu Mucyo, a annoncé sur Radio Rwanda la création de comités sur les gacacas comprenant des représentants du gouvernement, de la société civile et des bailleurs de fonds. Une réunion pour étudier les voies et moyens d'entamer la sensibilisation de la population aux gacacas dans les cellules devrait se tenir à Kigali mardi prochain, a indiqué le ministre Mucyo.

Selon une enquête de l'organisation rwandaise de défense des droits humains, LIPRODHOR , trois Rwandais sur quatre sont favorables aux juridictions gacaca.

Selon cette enquête, 81% des personnes interrogées estiment qu'en dehors des juridictions "gacaca" et des Chambres spécialisées des Tribunaux de première instance, il n'y a aucune autre voie susceptible de liquider le contentieux lié au génocide.

Par ailleurs 51% des Rwandais craignent que les relations inter-ethniques, les rapports sociaux ne soient compromis de manière irréversible en cas d'échec des gacacas, avec pour corollaire des troubles socio-politiques inévitables, poursuit l'enquête.

L'enquête a été menée dans tout le pays auprès d'un échantillon de 943 personnes représentant toutes les catégories sociales de la population.
42,84% des personnes interrogées sont de niveau d'instruction primaire, 44,22% de niveau secondaire, 3,39% de niveau universitaire, 9,54% sont des illettrés. Sur l'ensemble de cet échantillon, 144 personnes sont des rescapés du génocide.

Les juridictions gacaca seront coordonnées par Aloysie Cyanzayire. Aucun autre juge n'a encore été élu à ce jour.

AT/PHD/FH (RW%1013A)