01.07.07 - TPIR/DEFENSE - LES AVOCATS FRANÇAIS FACE A LA COMMON LAW

Paris,  01 juillet 2007 - La défense devant les juridictions pénales internationales constitue un défi pour un avocat français plus habitué à la procédure inquisitoire qu'au modèle anglo-saxon (Common law) mis en place dans ces tribunaux ad hoc, impliquant pour lui de nouvelles approches qui ont fait l'objet d'un colloque mercredi à Paris.  

2 min 47Temps de lecture approximatif

Cinq avocats français, dont quatre sont intervenus devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), ont détaillé le principe de l'enquête puis de l'audience devant les juridictions pénales créées en 1993 et 1994.

L'avocat français, à la différence de ses confrères anglo-saxons, n'est guère habitué à mener une enquête, retrouver des témoins pouvant disculper son client, les sélectionner et les préparer à leur audition ou à contre- interroger les témoins de l'accusation.

"Il est impératif de connaître la géographie des lieux", a indiqué Me Vincent Courcelle-Labrousse qui, avec Me Arthur Vercken, a défendu Jean Mpambara, ancien bourgmestre (maire) de Rukara (est), acquitté par le TPIR en septembre 2006. L'avocat explicitant qu'il a pu réfuter les propos de l'accusation grâce à sa connaissance des lieux.

Devant le TPIR, coexistent "deux enquêtes antagonistes, celle de l'accusation et de la défense", le procès étant leur confrontation sous l'arbitrage du tribunal, a expliqué de son côté Me Jean-Marie Biju-Duval qui a défendu l’historien Ferdinand Nahimana accusé dans le procès des médias de la haine, en appel.

Le témoin représente, quant à lui, "la ligne de front où s'affrontent les deux parties", a rajouté Me Courcelle-Labrousse.

D'où la nécessité, ont-ils affirmé, de travailler en amont avec les témoins choisis, d'effectuer le tri dans leurs déclarations entre ce qui relève du témoignage direct ou de l'indirect. Ils devront être choisis rigoureusement puisqu'ils seront soumis au choc de l'audience. Mais préparer un témoin ne veut pas dire l'influencer, a fait remarquer Me François Roux, le défenseur notamment de l’ancien maire Ignace Bagilishema également acquitté.

Tout témoin, qu'il soit de la défense ou de l'accusation, fait l'objet d'un contre-interrogatoire par la partie adverse. D'où, selon Me Roux, au-delà d'évidentes questions déontologiques, la nécessité de ne pas influencer un témoin de la défense qui sera mis ultérieurement sur le grill par l'accusation.

Tout contre-interrogatoire se limitant aux points évoqués lors de l’interrogatoire principal, il est "vital pour la défense" de préparer celui des témoins de l'accusation, a indiqué Me Courcelle-Labrousse.

Face à l'accusation, la défense est dans une situation d'inégalité, a déclaré Me Biju-Duval, ses moyens matériels étant bien inférieurs à ceux du procureur. "Il n'y a que des indigents dans ces procédures lorsque la défense a besoin de dizaines de milliers d'euros pour mener son enquête", a-t-il ajouté.

Le rôle de l'avocat ne se résume pas à la défense de génocidaire ou de criminels de guerre. L'adoption de la Cour pénale internationale (CPI), créée en juillet 1998, a permis aux victimes de devenir des acteurs de la procédure judiciaire, comme l'a indiqué, Me Emmanuel Daoud, avocat de citoyens de la République démocratique du Congo (RDC) contre Thomas Lubanga Dyilo. Le procès de cet ancien rebelle congolais est en cours devant la CPI. PAS/AT/GF © Agence Hirondelle