24.04.09 - RWANDA/GACACA - PROCES CONTROVERSE D'UN SAUVEUR DE TUTSIS ACCUSE DE VIOL

Kamonyi (centre du Rwanda), 24 avril 2009 (FH)- Le procès très controversé d'Eugène Naramabuye, un sauveur de Tutsis accusé de viol devant un tribunal gacaca du centre du Rwanda, traîne en longueur, en raison de l'absence de la partie plaignante.

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Pour la sixième fois consécutive, la juridiction gacaca du secteur Gihara, dans le district de Kamonyi, près de Kigali, a dû ajourner les débats jeudi.

Après une brève audience à huis clos, le jury est sorti pour annoncer que le procès était reporté à mercredi prochain.

Naramabuye dont plusieurs Tutsis affirment publiquement qu'il leur a sauvé la vie alors qu'ils avaient cherché refuge à la paroisse de Gihara, est accusé d'avoir séquestré et violé une jeune fille en avril 1994. Prénommée Gloriose, la fille a été assassinée par la suite par des assaillants.

« Une tante de la victime a porté plainte mais elle ne s'est jamais présentée au procès. Chaque fois, ceci sert de prétexte pour la remise de ce procès en appel », a confié à l'agence Hirondelle, un membre du jury qui a préféré garder l'anonymat.

Jeudi, comme aux précédentes audiences, la plaignante était absente.

Selon Naramabuye, actuellement détenu à la prison centrale de Gitarama (centre), de toutes les personnes qu'il avait cachées à la paroisse où il était employé, seule Gloriose n'a pas eu la chance de survivre. « Elle ne peut pas venir me laver de cet affront », déplore-t-il, avec chagrin.

Une dizaine de rescapés du génocide sont venus de plusieurs coins pour témoigner en faveur de leur sauveur.  Parmi eux, une employée de la Banque centrale du Rwanda, Livine Mukarage . « Du début à la fin du calvaire, je partageais la chambre avec Irène, Catherine et Gloriose. Je préfère que l'on m'accuse, moi, au lieu de dire du n'importe quoi », affirme-t-elle.

« Quelqu'un m'a demandé au téléphone de verser 300.000 francs (rwandais, environ 550 dollars américains) pour que mon mari ait la paix », a confié, à l'agence Hirondelle, l'épouse de l'accusé.

Dans ce secteur, la police locale suit de très près les procès devant les gacacas car certains juges sont soupçonnés de corruption. « Certains procès seraient initiés uniquement pour extorquer de l'argent aux accusés », estime une source policière.

La corruption est une réalité malgré la vigilance du Service nationale des juridictions gacacas. Les juges gacacas, qui ne touchent pas de salaire, ne sont pas des magistrats professionnels mais des « personnes intègres » choisies au sein de leur communauté.

SRE/ER/GF

© Agence Hirondelle