Rwanda: trois génocidaires présumés arrêtés en Belgique

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Trois personnes suspectées d'avoir pris part au génocide rwandais en 1994 ont été arrêtées et inculpées cette semaine en Belgique, ont indiqué samedi à l'AFP le parquet fédéral belge et le parquet rwandais.

"Deux ont été arrêtés mardi à Bruxelles et l'un mercredi dans la province du Hainaut, dans deux dossiers différents, et tous trois inculpés d'+infractions graves au droit humanitaire+", a précisé Eric Van Duyse, porte-parole du parquet fédéral belge, confirmant une information de l'hebdomadaire Le Vif/L'Express.

L'un des trois a été placé sous surveillance électronique, les deux autres incarcérés. Ces suspects avaient été confondus par "une quarantaine de témoins" rencontrés au Rwanda dans le cadre de l'enquête belge lors de quatre commissions rogatoires dans le pays , a indiqué M. Van Duyse.

Les massacres réalisés à l'instigation du régime extrémiste hutu au pouvoir au Rwanda ont fait environ 800.000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement parmi la minorité tutsi, mais aussi chez les Hutu modérés, selon l'ONU.

"Nous avons travaillé avec les autorités belges et saluons leur arrestation", a confirmé samedi auprès de l'AFP Faustin Nkusi, porte-parole de l'autorité du parquet au Rwanda. Les trois suspects, visés par des mandats d'arrêts internationaux, sont Pierre Basabose, Seraphin Twahirwa et Christophe Ndangali, a-t-elle précisé.

Pierre Basabose, riche homme d'affaires proche du pouvoir rwandais, est soupçonné d'avoir financé la propagande génocidaire, selon les dossiers de la Commission nationale de lutte contre le génocide (CNLG).

De même source, Seraphin Twahirwa a dirigé une milice Interahamwe responsable de massacres de Tutsi dans une région du centre du Rwanda, tandis que Christophe Ndangali, enseignant et intellectuel, a joué un rôle clef dans l'exclusion des Tutsi du système scolaire et dans l'appareil de propagande appelant à l'"extermination" des Tutsi.

Le renvoi éventuel de ces suspects devant une cour d'assises belge "sera déterminé en dernier lieu sur la base du dossier présenté par le juge d'instruction et le parquet", selon M. Van Duyse. "Nous avons réclamé leur extradition au Rwanda, mais nous comprenons que la Belgique a l'obligation de les juger. Nous désirons donc que justice soit faite", a observé Faustin Nkusi.

En Belgique, ancienne puissance coloniale, cinq procès en lien avec le génocide rwandais ont déjà eu lieu depuis 2001, ayant conduit à neuf condamnations.

En 2001, quatre Rwandais originaires de la région de Butare (sud), dont deux religieuses bénédictines, accusées d'avoir livré aux miliciens hutu plusieurs milliers de personnes réfugiées dans leur couvent, avaient été condamnés à des peines de 12 à 20 ans de prison.

Leur procès avait constitué une première mondiale pour une justice civile nationale hors du Rwanda.

Deux notables rwandais ont été condamnés en 2005 par la justice belge, puis un ex-major en 2007, et en 2009, un Rwandais, surnommé le "banquier du génocide", a été condamné à 30 ans de réclusion.

En décembre 2019 à Bruxelles, Fabien Neretsé, ancien haut fonctionnaire rwandais, avait été reconnu coupable du crime de génocide, pour la première fois en Belgique. Sa peine de 25 ans de prison est devenue définitive en mai avec le rejet de son pourvoi en cassation.

Le procès de deux autres suspects, dont les cas avaient été disjoints de celui de M. Neretsé, sont en préparation.

"Le Rwanda a émis 110 mandats d'arrêts contre des participants présumés au génocide, une quarantaine pour des fugitifs en France" et ces nouvelles arrestations en Belgique sont "un message fort pour les fugitifs, ils ne sont pas oubliés et la justice les trouvera", a indiqué samedi à l'AFP Jean Damascène Bizimana, secrétaire exécutif du CNLG.