Nagorny Karabakh: l'Azerbaïdjan enquête sur des crimes de guerre dans les deux camps

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Bakou a annoncé mercredi avoir ouvert une enquête sur de possibles crimes de guerre commis par les troupes arméniennes et azerbaïdjanaises durant les six semaines de conflit meurtrier ayant secoué l'automne pour la région du Nagorny Karabakh.

Le procureur général du pays, Kamran Aliev, a déclaré à l'AFP que son bureau enquêtait sur des vidéos montrant des traitements dégradants infligés à des prisonniers azerbaïdjanais ou des corps de soldats souillés par leurs ennemis.

"Nous avons également lancé une enquête sur le traitement inhumain de militaires arméniens qui ont été faits prisonniers", a-t-il ajouté dans une interview.

"Il y a beaucoup de fausses vidéos. Mais nous devons dire franchement qu'il y a aussi des vidéos qui pourraient être authentiques", a ajouté M. Aliev. "L'Azerbaïdjan est un État de droit et nous réagissons à de tels faits".

L'Azerbaïdjan et l'Arménie se sont mutuellement accusés de crimes de guerre durant les six semaines de combats meurtriers qui les ont opposé de fin septembre à début novembre pour le contrôle de la région séparatiste du Nagorny Karabakh.

Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux pendant et après les combats ont montré de supposées exécutions de prisonniers arméniens par des Azerbaïdjanais ou la profanation de corps de soldats azerbaïdjanais par des Arméniens.

Chaque camp a également accusé l'autre d'avoir délibérément bombardé des zones habitées. Selon Kamran Aliev, 73 enquêtes pénales concernant des bombardements de cibles civiles par les forces arméniennes ont été ouvertes.

Ces attaques "ont coûté la vie à 94 civils", a-t-il déclaré, ajoutant que quatre dirigeants séparatistes arméniens - dont le président du Nagorny Karabakh, Arayik Haroutiounian - sont accusés de crimes de guerre.

Le procureur général a indiqué à l'AFP que son équipe ainsi que les services de sécurité azerbaïdjanais enquêtaient également sur le déploiement de combattants étrangers par les séparatistes arméniens.

-'mercenaires étrangers'-

L'Azerbaïdjan a affirmé que des Arméniens issus de la diaspora ont combattu au Karabakh, Erevan accusant de son côté la Turquie d'avoir envoyé des mercenaires du nord de la Syrie pour épauler les forces azerbaïdjanaises, ce que Bakou et son allié turc démentent.

"Les mercenaires étaient surtout des Arméniens ethniques (de nationalités) d'autres pays", a affirmé M. Aliev.

"Parmi ceux qui sont recherchés il y a des Français, des Géorgiens, des résidents de Crimée ainsi que des combattants de l'aile syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)", a-t-il ajouté.

Le PKK, basé au Kurdistan turc et irakien, mène une insurrection contre l'Etat turc depuis 1994 et est considéré comme groupe terroriste par la Turquie et ses alliés occidentaux.

Selon le procureur, plusieurs enquêtes criminelles "concernent des cas d'Arméniens visant les infrastructures stratégiques azerbaïdjanaises", dont des missiles visant une centrale hydroélectrique et l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan, qui transporte du pétrole de la Mer Caspienne vers l'Europe.

Le Nagorny Karabakh a déclaré son indépendance il y a près de 30 ans mais n'a été reconnu ni par l'Arménie ni par la communauté internationale.

La France, les Etats-Unis et la Russie ont tenté à plusieurs reprises de mettre fin aux combats débutés le 27 septembre.

A l'issue de six semaines de combats, un accord de cessation des hostilités a finalement été signé le 9 novembre sous l'égide du Kremlin, alors que la situation militaire était catastrophique pour l'Arménie.

Selon les termes de cet accord, entré en vigueur le 10 novembre, l'Arménie s'est engagée à rendre plusieurs districts azerbaïdjanais échappant au contrôle de Bakou depuis 30 ans. La république autoproclamée du Nagorny Karabakh survit, amputée de plusieurs territoires.